Protestation relative aux obsèques de M. le Baron du Potet
Nous détachons du journal La Femme dans la famille et dans la société, numéro du 17-24 juillet, les passages suivants, dus à la plume érudite de notre savant collaborateur et ami M. de Cazeneuve, dont nous publierons prochainementdes articles de la plus haute importance et de la plus grande valeur.
Dimanche, 3 juillet dernier, les partisans du magnétisme accompagnaient à sa dernière demeure Jules du Potet, le chef de l’école mesmérienne moderne.
Plusieurs discours remarquablesont été prononcés, et pour ne pas jeter une note discordante dans ce concert de louanges bien méritées, nous nous sommes abstenu de prononcer un mot de critique sur la façon dont ses obsèques ont eu lieu.
Nous ne pouvons Je dissimuler, lous avons été péniblement impressionné, en voyant celui qui fut libre-penseur, anti-clérical même au premier chef, livré après sa mort, entre les mains avides de ceux qu’il n’a cessé de combattre avec énergie pendant toute la durée de sa longue et vaillante carrière. On pourrait même lui adresser ce fraternel reproche de n’avoir pas prévenu, par un codicille quelconque, un tel scandale.
Quoi qu’il en soit, les services rendus par du Potet à la cause du magnétisme sont incontestables, bien que ses contradicteurs soient nombreux et qu’ils aient tenté inutilement d’amoindrir sa renommée.
Il a le mérite, surtout d’avoir, par ses expériences souvent répétées en public, mis la science sur la voie de phénomènes physiologiques de la plus haute importance; et si elle n’en a pas tiré tout le parti désirable pour pousser au progrès, elle ne doit s’en prendre qu’à elle.
Du Potet, comme tous les hommes libres, était l’artisan de ses oeuvres; c’était un lutteur déterminé, infatigable, ennemi déclaré de tout préjugé de caste et de secte, il ne cesse dans ses ouvrages, et, notamment, dans son Essai sur l’enseignement philosophique du magnétisme, de l’affirmer toutes les fois que l’occasion s’en présente, et nul ne peut élever à ce sujet la moindre objection.
Comment donc se fait-il que le concours du clergé ait été réclamé? Il semblerait qu’un démenti est donné,par ce fait, aux actes de toute sa vie; et c’est contre cette tendance qui aurait pour but de représenter les libres-penseurs comme abdiquant à la dernière heure leurs convictions les plus chères et les plus profondes, qu’il importe de réagir. Le caractère de nos vaillants esprits n’en saurait être amoindri, quoi qu’on invente; ce serait faire injure à leur glorieuse mémoire que de les supposer capables d’une pareille lâcheté. Ce serait la désertion avec armes et bagages après la victoire; ce serait l’abdication la plus honteuse dont seraient seuls capables ceux qui voudraient les déconsidérer dans l’opinion publique. Mais les faits de ce genre, dont nous sommes tous les jours les témoins, parlent assez haut pour que nous nous demandions à quelle cause ils sont dus!
Jules du Potet fut libre-penseur, nous le répétons en terminant sans crainte d’être démenti, et il resta tel jusqu’à son dernier soupir; jamais il ne renia son passé si honorable et si digne d’être imité par ses adeptes, héritiers de sa gloire et de son dévouement à l’humanité.
L’homme peut revenir sur ses pas lorsqu’il a dévié de la ligne droite, et c’est le propre de l’âme d’élite; mais dès qu’il est entré à pleines voiles dans le domaine du progrès intellectuel et moral, sa force est telle qu’il ne recule jamais.
C’est ainsi que du Potet est entré triomphant dans l’immortalité.
Editor's notes
- ↑ Protestation relative aux obsèques de M. le Baron du Potet by Cazeneuve, De, La Chaine Magnetique, Aout 15, 1881, p. 18
Sources
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La Chaine Magnetique, Aout 15, 1881, p. 18